Introduction
Les arômes sont des substances responsables des propriétés organoleptiques d’une denrée alimentaire. Ils ne possèdent aucune qualité nutritive, mais jouent cependant un rôle essentiel. Le goût et l’odeur d’une denrée sont les facteurs qui déterminent l’acceptation de celle-ci par un individu. En effet, un seul composé, ou un petit groupe de composés, suffit parfois à reproduire la |
note typique d’un aliment. Un arôme n’est pas considéré comme un additif1, même s’il répond à sa définition, c’est une catégorie à part. La vanille, épice qui a été de tout temps très convoités, est aujourd’hui l’arôme le plus répandu dans le monde. Nous verrons donc comment cette plante atypique a pu, au cours des ans, susciter un tel engouement, et a conduit à l’imitation de son arôme par différents procédés, dont les coûts sont très variables. Les utilisations de ces arômes en industrie agroalimentaire sont nombreuses. Pour que le consommateur ne soit pas lésé, il a fallu instaurer des règles précises et s’assurer de leur respect.
- LA VANILLE
Culture de l’orchidée de vanille
Origine
Originaire du Mexique, la vanille était auparavant utilisée pour l’aromatisation du cacao. C’est à la fin du 15ème siècle suite à l’invasion du Mexique par les conquistadores espagnols que Hernando Cortez fit importer la gousse de vanille en Europe. Arrivée en France dès le siècle suivant, la vanille fut vite appréciée. A la fin du 18ème siècle, les français implantèrent quelques vanilliers à Madagascar, à Tahiti et sur les îles de France et Bourbon. Cependant la gousse de vanille ne semblait se développer qu’au pays d’origine. En 1836, le botaniste Charles Morren, à la suite d’observations sur les vanilliers du Mexique, découvrit que c’est en fait des hyménoptères3 du genre melipona qui permettaient la fécondation de la fleur et donc la formation des fruits. On a tenté d’introduire cet insecte dans les différents lieux d’exportation de l’orchidée, mais cela fut un échec, car l’insecte ne put survivre hors du Mexique. Il fallut attendre 1841 pour qu’un jeune esclave réunionnais Edmond Albius découvre la méthode de fécondation manuelle. C’est alors que la culture du vanillier put prendre son essor ailleurs qu’au Mexique (Madagascar, la Réunion, les Comores,).
- Botanique
Le vanillier est une liane tropicale de la famille des orchidées, cultivées pour ses fruits, qui sont des capsules et non des gousses, comme on le dit couramment. Pour faciliter la compréhension nous allons néanmoins conserver le terme de gousse. Le vanillier croît dans les pays chauds et humides, à basse altitude (moins de 600 mètres). Il peut atteindre plusieurs dizaines de mètres de long en utilisant comme tuteur des arbres tels que le caféier, l’avocatier auxquels il s’attache à l’aide de vrilles4 et de racines adventives5, pour trouver de l’ombre. Pour augmenter le rendement, la plantation des vanilliers se fait par bouturage. Cela permet d’éviter les aléas de la germination. Le vanillier fleurit généralement dès la troisième année de plantation.
La fleur de vanille
Les fleurs, d’environ 8 cm de large, jaune ou vert-jaunâtre, forment de courtes grappes6. Elles ont l’organisation typique de la famille, y compris le caractère hercogamique7 de leurs pièces sexuées qui rendent nécessaire l’intervention d’un insecte spécialisé. En effet l’entrave de l’autopollinisation est d’origine mécanique et repose sur l’existence d’un obstacle (rostellum) empêchant le dépôt du pollen sur la surface stigmatique. |
Il existe trois types de vanilliers : Vanilla planifolia qui est la vanille la plus couramment utilisée, Vanilla pompona et la Vanilla tahitensis venant de Tahiti, aux gousses plus volumineuses et ayant une senteur plus capiteuse encore et légèrement anisée et dont la rareté accroît encore le prix . Nous allons nous intéresser à la Vanille planifolia et plus particulièrement à «la vanille Bourbon ».
Fécondation/pollinisationSchéma de la fécondation manuelle de la fleur de vanille Le fruit étant le produit commercial, la fécondation doit nécessairement avoir lieu. Pour cela, on effectue la fécondation manuelle de la fleur de vanille, même au Mexique où cela n’est pas nécessaire, pour avoir un meilleur rendement. La pollinisation que l’on appelle « mariage » de la vanille consiste à l’aide d’une petite épine de citronnier ou une pointe de bambou à remonter le rostellum afin de mettre en contact l’anthère, qui contient le pollen et le stigmate. Cela permet au grain de pollen de germer et de féconder les ovules. Cette opération s’effectue à l’heure d’ouverture des corolles (le matin entre 6h et 11h), durant la seule journée où fleurit l’orchidée. Si la fécondation est réussie, la fleur fane rapidement ; sinon elle tombe Les fruits de la vanille apparaissent environ un mois après le « mariage ». Il faut encore attendre sept ou huit mois, pour que les fruits soient mûrs. La récolte commence dès que les gousses se colorent d’une nuance particulière de jaune. Un peu plus tôt : la gousse manquera d’arôme ; un peu plus tard, la gousse s’ouvrira et perdra toute valeur. |
Les pays producteurs
Sur les 20000 tonnes de vanille dont le monde à besoin chaque année, moins de 2000 tonnes sont des produits naturels aujourd’hui. En sachant que les trois plus grands producteurs, sont :
Cependant la production de vanille de chaque pays est très fluctuante d’une année à l’autre compte tenu des aléas climatiques (en effet si nous prenons l’exemple de Madagascar, sa production était de 900 tonnes en 2002 et de 500 tonnes en 2003 en raison de la sécheresse et des ouragans) .
Les principaux pays importateurs sont : les États-Unis à hauteur de 800 tonnes par an, la France et l’Allemagne environ 200 tonnes par an chacune.
La préparation des gousses de vanille
La vanille doit subir une préparation particulière pour son utilisation. En effet lorsque les gousses de vanille sont récoltées, elles n’ont aucun parfum. Elles contiennent seulement les matériaux nécessaires à la formation ultérieure de l’arôme. C’est pourquoi les gousses doivent être traitées dans les meilleures conditions pour permettre le déclenchement des réactions enzymatiques, par le biais des glucosidases, qui conduisent à la formation d’arôme. Tel est le but des différentes opérations qui constituent la préparation.
Nous allons décrire la méthode de préparation dite « Bourbon », utilisée à la Réunion, à Madagascar et aux Comores. Il en existe d’autres, mais elles donnent des produits de qualité moindre.
Mortification des gousses de vanille
La première chose à faire est de trier les gousses selon leur état (grandes, moyennes, petites et fendues), car le traitement sera plus ou moins rapide suivant la taille. La loi interdit l’achat de gousses immatures, car elles nécessitent plus de soins à la préparation et donnent un produit de qualité inférieure. Les gousses sont alors prêtes pour être échaudées. Elles sont mises dans des paniers et plongées dans de l’eau à 63°C pendant 3 minutes, pour stopper toute végétation. C’est un temps moyen, car, en pratique, les températures et les durées de trempage varient légèrement en fonction de la qualité des gousses traitées, de l’expérience du préparateur, etc.
Fermentation
Après échaudage, les gousses sont rapidement égouttées, et encore toutes chaudes, elles sont versées dans le caisson d’étuvage. Ce sont de grandes caisses en bois capitonnées. A l’intérieur, les gousses sont recouvertes également de couvertures. Les caisses sont fermées, ce qui permet de maintenir constante la température dans les caissons d’étuvage pendant plusieurs heures. Sous l’action de la température, les réactions enzymatiques démarrent rapidement. Quand les gousses sont retirées des caissons, elles sont de couleur brunâtre, signe qu’elles sont mortes. Alors commence le séchage.
Séchage
Le séchage peut être effectué de deux façons, soit au soleil, soit au four. En effet dans certains pays, le séchage au soleil est rendu difficile en raison des conditions météorologiques (ciel nuageux, averses fréquentes, …). Il faut alors avoir recours à un séchoir à air chaud.
Le séchage au soleil
Les gousses sont étendues sur des couvertures, et exposées au soleil pendant trois heures par jour entre 9h et 14-15h. Le séchage au soleil dure 3 à 7 jours jusqu’à ce que les gousses deviennent souples.
Le séchage au four
L’appareil utilisé est un séchoir industriel. La température est maintenue à 60°C, par le biais d’un thermostat. Les gousses restent trois heures par jour. La vanille passe dans le séchoir de 4 à 7 jours selon la qualité. Par exemple les gousses petites et fendues sèchent plus vite que les grandes. Les avantages de cet appareil sont nombreux.
D’abord, le produit est traité d’une manière homogène, sans à-coup. Il est possible de travailler jour et nuit si nécessaire, et dans n’importe quelle condition climatique. Il permet également une importante économie de main-d’œuvre, car les manipulations sont réduites au minimum, tandis que la méthode traditionnelle de séchage au soleil, nécessite plus de main d’œuvre pour sortir et rentrer les gousses à chaque averse. De plus cette méthode permet de diminuer le nombre de couvertures utilisées, qui sont souvent source de contamination. Ajoutons enfin que le produit final a une meilleure qualité et un meilleur rendement. Le séchoir est uniquement utilisé en remplacement du séchage au soleil.
4. Séchage à l’ombre
La préparation n’est pas terminée, mais le séchage doit être ralenti pour éviter un trop grand dessèchement des gousses, qui dans ce cas, ne présenteraient pas un bel aspect, ce qui se traduirait par un manque à gagner pour le producteur. Une gousse de bonne apparence doit être souple, grasse et huileuse. Les gousses de vanille sont donc placées dans une grande pièce bien ventilée avec de grandes ouvertures. Le séchage et les réactions enzymatiques se poursuivent simultanément. Après un à deux mois de séchage à l’ombre, celui-ci est arrêté. Elles ont perdu environ 60% de leur teneur en eau. Les gousses de vanille sont alors mises en petits paquets d’une centaine liées et mises en malle.
Séjour en malles
Le séchage est très ralenti, mais les réactions enzymatiques se poursuivent : le parfum s’affine. Comme ces réactions sont des réactions d’hydrolyse, la vanille libère de l’eau. Si cette opération est négligée, des moisissures peuvent apparaître et entraîner la dégradation de la vanille, ou tout au moins causer des pertes. Après deux mois dans les malles, la préparation est terminée. Si la vanille a été récoltée à maturité et si la préparation a été bien faite, le produit peut être conservé plusieurs années sans problème.
Mais si le vieillissement des gousses est prolongé d’encore un ou deux ans, dans leur caisse, leur moitié inférieure se couvrira peu à peu d’une sorte de givre pailleté jaune pâle : de la vanilline en cristaux exsudant9 du fruit.
Comme on peut le voir, le processus de préparation de la vanille est lent et délicat. Il s’étend sur environ quatre mois. Le rendement est compris entre 15 et 20%, il faut 5 à 6 kilos de vanille verte pour produire un kilo de vanille noire préparée.
Au moment de leur commercialisation, les gousses de vanille ont des teneurs en eau variables en fonction des techniques de préparation, et donc du pays d’origine (entre 15 et
40%). Par rapport à la matière sèche, la gousse contient 1,3 à 3 ,8% de vanilline, 4,5 à 15% de corps gras et 7 à 20% de glucides, principalement glucose et fructose.
Mode d’obtention de l’arôme
Les chimistes ont essayé d’obtenir synthétiquement le parfum que la vanille exhale. C’est ainsi qu’ayant découvert la vanilline (Figure 4), principal constituant de l’arôme de vanille, ils en ont ensuite fait la synthèse. Selon la réglementation sur les arômes, on peut les classer en trois catégories, arôme naturel, arôme identique au naturel et arôme artificiel. La différence entre ces catégories sera développée ultérieurement. ( Exsudant : issue du suintement pathologique d’un liquide organique.) |
L’arôme naturel
D’après la réglementation il existe deux méthodes principales pour obtenir un arôme naturel, la méthode traditionnelle d’extraction et le biais des biotechnologies.
Extrait de la gousse
La vanilline naturelle est présente à hauteur de 2% dans les gousses de vanille. Il faut50 kg de gousses de vanille pour produire 1 kg de vanilline naturelle. La vanilline est extraite en faisant macérer les gousses de vanille, préalablement broyée, dans un mélange d’eau et d’alcool. Ce mélange a le pouvoir de pénétrer la structure cellulaire des tissus de la gousse de vanille pour aller chercher et décrocher la vanilline au cœur du végétal. Il faut plusieurs « lavages » successifs du mélange hydroalcoolique pour entraîner la totalité de la vanilline. A chaque lavage, le solvant ressort chargé de vanilline mais aussi de nombreux autres composés dont des cires, des tanins, des sucres, des résines, et beaucoup de molécules aromatiques lui conférant ses caractéristiques gustatives. Le liquide final obtenu sera ensuite filtré pour se débarrasser des impuretés entraînées lors du passage du mélange hydroalcoolique sur les gousses de vanille. La dernière étape consiste à chauffer modérément le liquide filtré afin de séparer par évaporation sous vide l’alcool de l’extrait de vanille (constitué à 95% de vanilline). La vanilline naturelle, étant accompagnée d’autres parfums, cela donne un mélange complexe bien supérieur par sa finesse à la vanilline de synthèse. Cet arôme est différent suivant le pays d’origine, l’espèce de vanillier, les conditions de culture, de récolte et de préparation. Il existe une demande croissante des consommateurs pour les arômes naturels que la culture actuelle du vanillier ne peut satisfaire. C’est pourquoi, récemment, un procédé biotechnologique a été élaboré.
Par bioconversion,
La production de vanilline naturelle par voie biotechnologique répond au critère lui permettant d’avoir le label naturel et offre un nouveau marché à fort potentiel. L’INRA a mis au point un procédé exploitant des champignons filamenteux du groupe des basidiomycètes, afin de transformer en vanilline un composant abondant des parois de cellules végétales, l’acide férulique. Les matières premières végétales utilisées sont, soit les coproduits de la meunerie, c’est à dire les sons de blé, soit les coproduits de l’industrie du sucre, c’est à dire la betterave. Ces produits ont été choisis en raison de leur disponibilité, de leur faible coût et de leur richesse en acide férulique.
La première étape consiste à libérer l’acide férulique grâce à l’action d’enzymes agissant sur les parois cellulaires des coproduits. C’est en 1994 que l’on a réussi à isoler de telles enzymes (auparavant le rendement était insuffisant). Ce sont les férulacé-estérases, chez un champignon filamenteux, Aspergillus Niger. Cependant, ces enzymes ne peuvent à elles seules libérer l’acide férulique des parois cellulaires : une dégradation enzymatique préalable du squelette pariétal est nécessaire. Au bout du compte, en enrichissant des préparations enzymatiques commerciales en férulacé-estérases, plus de 95% de l’acide férulique contenu dans les sons de blé et les pulpes de betterave peuvent être libérés. Aspergillus Niger transforme ensuite l’acide férulique en acide vanillique, avec un rendement de bioconversion de 82%.
Il faut ensuite former de la vanilline à partir de l’acide vanillique. Pour cela on doit utiliser une souche de champignons basidiomycètes bénéficiant du statut GRAS, qui autorise leur utilisation dans les procédés agro-industriels destinés à l’alimentation humaine. Une seule souche appartenant à l’espèce Pycnoporus cinnabainus, s’est avérée productrice de vanilline. En raison de l’instabilité de cette souche, liée à son caractère dicaryotique et à la présence d’une enzyme la laccase, capable de piéger l’acide férulique par polymérisation, on a sélectionné des souches dépourvues d’activité laccase et capable de donner un mycéliumstable. Pour augmenter encore le rendement, il convient d’inhiber les autres fuites métaboliques possibles. Par l’ajout de substances comme la cellobiose, un sucre réducteur produit lors de l’hydrolyse enzymatique des coproduits végétaux, qui limite la fuite génératrice de méthoxyhydroquinone. Ou en fixant la vanilline spécifiquement, tout en ayant une affinité la plus faible possible pour l’acide vanillique. Cette fixation a pour but d’empêcher la transformation de la vanilline en alcool vanillique. Cette méthode prometteuse devrait déboucher à moyen terme sur une production industrielle.
Arôme identique au naturel : la vanilline
Il existe quatre substances de base (la coniférine, l’eugénol, le gaïacol et la pulpe de bois) pour la synthèse chimique de la vanilline. Les substances les plus utilisées sont l’eugénol et le gaïacol.
A partir du gaïacol De nombreux procédés ont été étudiés et mis en œuvre pour introduire, dans le noyau du gaïacol, (Figure 6) la fonction CHO en position para de l’OH libre. Les deux procédés les plus connus utilisent soit du chloroforme, soit de l’aldéhyde formique. Ce dernier procédé est d’ailleurs parmi ceux qui fournissent la vanilline au prix le plus bas, le rendement étant de 80% et le gaïacol n’ayant pas réagi pouvant être récupéré. Son seul inconvénient est Qu’il demande une installation industrielle assez importante. |
A partir d’eugénol
L’eugénol est une substance que l’on retrouve dans les clous de girofle. Les procédés de synthèse de vanilline peuvent être effectués à partir de l’eugénol et même directement de l’essence de girofle. Ils consistent à chauffer, en autoclave et sous agitation un mélange d’eugénol, de lessive de potasse, qui produit l’isomérisation de l’eugénol en iso- eugénol, et d’un oxydant qui provoque la rupture de la chaîne propylique et la formation de la fonction aldéhyde. Ce peut être par exemple du permanganate de potassium, etc… Dans tous les cas, il est nécessaire de bloquer la fonction phénol libre avant de procéder à l’oxydation. On agite ensuite avec du bisulfite de sodium, on sépare la combinaison bisulfitique, on lave au benzène et on la décompose par l’acide sulfurique étendu : il se dégage du gaz sulfureux et il reste un liquide huileux dont on amorce la cristallisation pour avoir de la vanilline.
A partir de la coniférine
La coniférine est un glucoside, extrait en quantité importante des bois résineux. Si on le traite par un agent hydrolysant, il donne du glucose et de l’alcool coniférylique. Ce dernier est oxydé par le bichromate ou le permanganate de potassium pour donner la vanilline et un peu d’acide vanillique. Il est possible de rencontrer un autre mode opératoire de fabrication de la vanilline à partir de la coniférine (Annexe IV).
A partir de pulpe de bois
Le procédé consiste en une sulfonation préliminaire de la liqueur sulfitique, suivie d’un traitement à la soude caustique que l’on peut récupérer. La solution est ensuite acidifiée avec de l’anhydride carbonique, d’où la vanilline est extraite et purifiée. La vanilline obtenue a un degré de pureté élevé.
Arôme artificiel : l’éthyl-vanilline Contrairement à la vanilline qui peut être un produit naturel, l’éthyl- vanilline n’est obtenue que synthétiquement à partir de benzène. Sa structure est la même que celle de la vanilline ; seul le radical éthyle remplace le radical méthyle de la vanilline. Son parfum et sa saveur sont environ quatre fois plus puissants que ceux de la vanilline, mais ont une finesse moindre. Cependant elle est maintenant très employée dans la préparation des sucres vanillines. |
La vanille dans l’industrie agroalimentaire.
L’utilisation des arômes s’accroît de manière continue dans pratiquement tous les secteurs de l’agroalimentaire. Cette expansion s’explique, en partie, par l’évolution des modes de vie et des produits alimentaires proposés aux consommateurs. Aujourd’hui déjà, plus d’un tiers de l’alimentation d’un européen est aromatisée. Au niveau des arômes sucrés, la vanille est la plus utilisée.
Réglementation
Les arômes alimentaires sont réglementés au plan communautaire par la directive cadre
« arômes » 88/388/CEE, qui définit les différentes catégories d’arômes, ainsi que les conditions d’emploi du terme « naturel ». Cette directive qui a été transposée en droit français par le décret du 11 avril 1991 relatif aux arômes alimentaires, pour ce qui est des définitions, et par l’arrêté du 11 juillet 1991 relatif aux critères généraux de qualité et de sécurité des arômes [15].
Les différents types d’arômes
D’après le décret n°91-366 du 11 avril 1991, il existe six catégories d’arômes. Pour la vanille seules quatre nous intéressent :
La préparation aromatisante est un produit, autre qu’une substance aromatisante naturelle, concentré ou non, qui est obtenu soit par des procédés physiques appropriés, y compris la distillation et l’extraction au solvant, soit par des procédés enzymatiques ou microbiologiques, à partir de matières végétales ou animales prises en l’état ou après leur transformation pour la consommation humaine par des procédés traditionnels de préparation des denrées alimentaires, y compris le séchage, la torréfaction et la fermentation.
Les substances aromatisantes naturelles : qui sont des substances chimiquement définies qui sont obtenues soit par des procédés physiques appropriés, y compris la distillation et l’extraction au solvant, soit par des procédés enzymatiques ou microbiologiques, à partir d’une matière d’origine végétale ou animale prise en l’état ou après sa transformation pour la consommation humaine par des procédés traditionnels de préparation des denrées alimentaires, y compris le séchage, la torréfaction et la fermentation.
Des substances aromatisantes identiques à une substance aromatisante naturelle sont des substances chimiques définies qui sont chimiquement identiques à une substance aromatisante naturelle après avoir été obtenue par synthèse chimique ou isolée par des procédés chimiques.
Une substance aromatisante artificielle est une substance chimique définie qui, ayant été obtenue par synthèse chimique, n’est pas chimiquement identique à une substance aromatisante naturelle.
Etiquetage
Afin d’éviter toute confusion, entre la vanille naturelle, et les substances synthétiques qui l’imitent, un texte définissant la vanille et permettant de renseigner l’utilisateur et le consommateur sur la véritable nature du produit aromatisant employé a été mise en place. Pour cela, on différencie l’appellation du produit naturel de celle des produits artificiels ou de synthèse (Tableau 1). Même si cet étiquetage est prévu pour informer le client, il n’est pas évident que celui- ci ait bien conscience des nuances au niveau de la liste des ingrédients et de la dénomination de vente des produits aromatisés et seule la représentation graphique peut avoir une influence sur le consommateur moyen.
Composition de l’arôme | Dénomination | Dénomination | Mention | Représentation |
de vente de | de vente du | de l’arôme | graphique de la | |
l’arôme | produit aromatisé | dans la liste des ingrédients | plante ou d’une partie de la plante |
Gousses de vanille ou | Gousse de | A la vanille | Gousse de | OUI |
extraits purs | vanille ou | vanille ou | ||
de vanille | extrait pur de vanille | extrait pur de vanille | ||
Mélange d’extrait(s) | Mélange | A la vanille | Gousse de | OUI |
pur(s) de | d’extrait(s) de | vanille ou | ||
vanille et d’autres | vanille et | extrait pur | ||
extraits de sources | d’autres | de vanille | ||
végétales ou animales autorisées | extraits | et autres extraits | ||
Mélange d’extraits purs | Arôme | Goût vanille | extrait de | NON |
de vanille, | vanille- | vanille, | (mais symbolique | |
d’autres sources | vanilline | vanilline et | possible à | |
végétales ou animales | et autres | autres | condition qu’elle | |
autorisées et de | arômes | arômes | ne prête pas à | |
substances identiques | (Arôme | confusion avec | ||
aux naturelles. | renforcé vanille) | les produits à la vanille) | ||
Substances identiques aux naturelles | Vanilline et autres arômes | Vanilline | Arômes : Vanilline et autres arômes | NON |
Présence d’une ou | Arôme(s) | Arôme | Arôme(s) | NON |
plusieurs | artificiel(s) | artificiel | artificiel(s) | |
substances artificielles | vanille | (éthyl- | ||
(non identiques aux naturelles) | vanilline) |
Tableau 1 : L’emploi des arômes de flaveur vanille [1].
Contrôle du taux de vanilline des gousses
A part ces contrôles d’authenticité des arômes vanille, la DGCCRF fait également des contrôles sur les gousses de vanille importées de l’océan indien, (Madagascar, les Comores…) en utilisant la chromatographie liquide haute performance pour contrôler la teneur en vanilline des gousses de vanille. De ce fait la DGCCRF a remarqué une baisse des teneurs de la vanilline dans les gousses de vanille ces dernières années : alors que les critères préconisent un taux de vanilline de 2%, on remarque en 1999 dans les pays comme les Comores et Madagascar que sur une moyenne de 248 échantillons nous avons un taux de 1,77% de vanilline dans la gousse de vanille (alors qu’en 1996 sur nous avions une moyenne de 1,96%).
A ce jour, on ne sait pas si c’est l’évolution des méthodes analytiques, les conditions climatologiques ou les techniques de préparation des lots de gousses, ou les trois qui sont responsables de cette dérive. Ces données pourraient servir de base d’une part pour encourager les producteurs à améliorer la qualité de leur production, et d’autre part pour éventuellement vérifier que les critères analytiques sont en accord avec la réalité du marché.
Aspect économique
Les différents produits
- De nombreux produits utilisent de la vanille, naturelle ou synthétique. Les principaux produits sont :
- les sucres vanillés ou vanillinés, selon qu’ils contiennent des arômes naturels de vanille ou d’éthyl-vanilline .
- l’arôme naturel de vanille liquide, vendu en petites quantités. Il contient du sirop de glucose, de l’eau, de l’extrait naturel de vanille avec la possibilité de présence d’autres arômes naturels, comme le caramel.
- les boissons, surtout représentées par l’entreprise Coca-Cola, qui utilise à elle seule environ 200 tonnes de vanille par an, pour son produit Vanilla Coke lancé en 2002. Ce qui représente 10% de la production mondiale
- Les produits laitiers
- la glace : selon la législation, la glace doit obligatoirement contenir de l’arôme naturel de vanille.
- les yaourts qui peuvent soit contenir de l’arôme naturel, soit de l’arôme identique au naturel.
- les pâtisserie, biscuiterie : dans ce cas, la vanille peut être utilisée comme fourrage, ce sera l’arôme principal du produit, ou bien elle peut être utilisée pour rendre plus subtil le goût du produit, par exemple on rajoute souvent de l’arôme vanille dans la pâte du biscuit.
- la chocolaterie : la quasi-totalité du chocolat utilisé pour les tablettes ou le fourrage, nappage des biscuits contient de l’arôme vanille. Souvent naturel pour les tablettes de chocolat, il peut soit être naturel, soit identique au naturel pour les biscuits.
En règle générale, les industriels ont le choix entre les différents types d’arôme vanille. Ce choix est guidé par le prix de la vanille, mais aussi par la volonté de l’industriel s’il ajoute des arômes naturels, de véhiculer une image valorisant la santé, la qualité et la tradition de son produit.
Les prix
Evolution des prix de la vanille
Comme nous venons de le voir le prix est un élément essentiel dans le choix de la source d’arôme. Nous allons plus particulièrement nous pencher sur le cas de la vanille malgache, car Madagascar est le premier producteur de vanille (I.B). On a assisté à une véritable flambée des cours de la vanille naturelle. Le prix pour la campagne de 1997-1998 était de 50-60 € le kilo, et il atteind 200 € en 2002. Cette hausse peut s’expliquer en partie par le cyclone Hudah en 1999 et la sécheresse, qui ont ravagé la région de SAVA, considérée depuis longtemps comme la capitale mondiale de la vanille. Il a fallu alors replanter, la production a donc dangereusement chuté. « Ce qui est rare est cher » d’où la hausse continue du prix. La fluctuation des prix et des productions de la vanille naturelle profitent au marché de la vanilline de synthèse qui est beaucoup moins chère. La production mondiale de vanilline de synthèse est de l’ordre de 12 000 tonnes par an. L’industrie glacière, qui ne peut pas normalement utiliser des arômes artificiels, a vu ces prix augmenter, à l’image de Häagen Dazs, qui justifiait la hausse de 15% du prix de ses glaces par un renchérissement des matières, comme les gousses de vanille.
Différence de prix entre les arômes.
Aujourd’hui la vanille naturelle coûte environ 200 € par kilogramme de gousses. Sachant que la vanilline représente 2% du poids total de la gousse, on peut estimer que les concentrés de vanille naturelle coûtent environ 4000 € par kilogramme, un prix dissuasif. Pour un coût bien moindre, 15€ par kilogramme, on obtient de la vanilline identique au naturel. A des prix défiants encore plus la vanille naturelle se trouve l’éthyl vanilline qui est environ deux fois plus cher que la vanilline de synthèse (30 €), mais dont le pouvoir aromatisant est quatre fois plus puissant. L’éthyl vanilline revient donc deux fois moins cher à l’industriel. (18 SAVA : Région qui comprend les villes de Sambava, Ambanja, Vohémar et Antalaha)
Il serait très intéressant pour les industriels d’obtenir par voie biotechnologique, à un prix concurrentiel une vanille pouvant bénéficier du label naturel. Pour l’instant cette innovation n’a pas atteint le stade de la production industrielle, mais les scientifique pensent que le prix se situera entre celui de la vanille naturelle et de l’arôme identique au naturel .
Conclusion
Les consommateurs sont de plus en plus attirés par les produits naturels. Or la production de vanille n’a jamais été industrialisée, les plantations ne reçoivent aucun apport chimique et les procédés de transformation des gousses, de vertes à noires par l’échaudage, l’étuvage puis le séchage, demeurent on ne peut plus traditionnels. Mais cette tradition a un coût, on assiste actuellement à une flambée des cours de la vanille, qui a conduit entre autres, à l’émergence des produits de synthèse identiques au naturel ou artificiel, qui sont beaucoup moins coûteux. Cette augmentation des coûts a aussi des conséquences sur les pays producteurs. En effet, dans le cas de Madagascar la hausse des prix risque de stimuler la concurrence de pays émergents dans la culture de la vanille, comme l’Inde ou l’Ouganda. Mais on note aussi des problèmes d’insécurité. Il ne se passe pas un jour sans que les médias locaux ne parlent d’attaques à main armée.
Cette insécurité grandissante dans la région de SAVA fait hésiter les organismes de préfinancement qui donnent l’essentiel des fonds destinés à la collecte. Toutes ces conditions inquiètent les exportateurs. Bon nombre d’entre eux pensent que cette situation entraîne la fin de la filière d’ici quelques années.